Monsters de Gareth Edwards par Bruno D

  Le film Monsters, sorti sur les écrans français le 1er Décembre, et qui fut une première fois proposé aux strasbourgeois lors du Festival du Film Fantastique, nous plonge dans les péripéties d'un jeune photographe avide de succès qui doit traverser une zone infestée d'extraterrestres afin de sauver sa peau et celle de la charmante fille de son patron.

  En apparence, nous sommes donc en présence d'un film de science-fiction qui reprend la plupart des codes du genre. En effet, de la romance qui naît peu-à-peu entre les deux héros, bien entendu jeunes et beaux, en passant par les extraterrestres qui ne sont, finalement, pas si méchants que ça et pour finir avec l'autochtone fourbe, le réalisateur tire les ficelles bien connues du genre et l'on sent plané l'influence de La Guerre des Mondes de Spielberg.

Mais au-delà de cela, le film propose plusieurs aspects forts intéressants. Premièrement, l'aspect géopolitique du film qui fait référence à l’immigration et aux tensions actuelles aux abords de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique donne au film une portée qui dépasse la pure science-fiction. De plus, la qualité époustouflante des images, dans leurs couleurs et le travail sur le flou, apporte un intérêt plastique que les "esthét" apprécieront. La caméra à l'épaule utilisée pratiquement tout au long du film nous plonge au plus profond de l'action, comme dans la remarquable séquence d'ouverture qui nous dévoile directement le visage des monstres par le biais d'une caméra embarquée dans un groupe d'intervention militaire et qui se rattache au style documentaire.

Au niveau scénaristique, le film comporte une entorse à la narration classique des films d'extraterrestre; il présente un monde où les extraterrestres sont déjà établis. La question de la cohabitation se pose; doit-on les combattre quand les moyens mis en oeuvre pour cela font plus de victimes que les extraterrestres eux-mêmes? C'est la problématique de fond du film qui semble tout de même un peu légère.

Mais la partie la plus étonnante du film reste la qualité de ses effets spéciaux; d'un réalisme qui n'a pas à rougir devant de plus grosses productions. Car on peut maintenant le révéler, ce film a coûté moins de deux cents milles dollars, et non quinze milles comme l’annonce les Cahiers du cinéma. Malgré tout, cela reste une modique somme quand on sait que La Guerre des Mondes a coûté quant à lui 132 millions. Monsters est donc un film "indé", tourné de manière assez "sauvage" et réalisé au "feeling" pour un résultat très convainquant. Les seules grosses faiblesses du film résident dans la pauvreté navrante des dialogues et le cruel manque de talent des acteurs qui ne nous permettent pas d'y croire totalement.

Néanmoins, ce film issu d'un cinéma indépendant vaut le détour. Son succès prouve que la philosophie de réalisation de Gareth Edwards a porté ses fruits. On peut penser dès lors que l'idée d'un retour à de plus petits projets réalisés de manière plus libre, même quand il s'agit de science-fiction, a sa place dans une production actuelle qui peine à trouver des fonds et qui sature sous le poids des blockbusters.

Bruno D