Another year de Mike Leigh ou le jardin de Mike Leigh
Mike Leigh revient cette année avec un 11ème long-métrage très attendu et dont on aurait pu parier qu'il permettrait à son réalisateur de décrocher une deuxième palme d'or après Secrets et mensonges en 1997. Mais la seule récompense que le film a reçu est la "fameuse" Mention spéciale du Jury oecuménique...
Pourtant, ce film est une petite merveille. Mike Leigh est définitivement un metteur en scène du quotidien, impliqué dans un certain réalisme social qui n'est jamais dénué d'une subtile poétisation. Car les deux heures de film reposent sur le quotidien d'un couple d'une soixantaine d'années, proche de la retraite, qui cultive des légumes et des relations au fil des saisons. Oui, ça n'a l'air de rien, pourtant ce rien représente la vie de millions de gens. Et on a là tout le talent de Mike Leigh et de ses acteurs, rendre un quotidien, somme toute assez banal, passionnant, drôle, touchant et vraiment savoureux.
Tom et Gerry, possèdent une petite maison en banlieue de Londres. Tel deux chênes aux branchages rassurants, ils y reçoivent leur amis; Mary, une rose célibataire et alcoolique qui se rend compte qu'elle se fane sans avoir été cueillie, Ken, un gros légume veuf et alcoolique, qui voudrait bien cueillir Mary mais qui s'y pique à chaque maladroite tentative et Joe, unique pousse de Tom et Gerry. Néanmoins, tout n'est pas rose pour ces deux feuillus. Leur apparente bonhomie pourrait bien dissimuler une pourriture qui les rongent de l'intérieur et qu'ils tentent de fuir en s'entourant de personnes en crise. Mais ce résumé est vain dans la mesure où il est impossible de résumer le quotidien qui ne connait pas la cohérence d'une narration classique.
Allez donc déguster ce film, vous assisterez à de magnifiques numéros d'acteurs, tous impeccables. Cela tient en partie à la méthode de travail de Mike Leigh qui, une fois qu'il a transmis l'idée du personnage à son acteur, lui laisse écrire ses dialogues. La mise en scène discrète est remarquable et crée un ambiance authentique.
Finalement, la vrai qualité de ce cinéma est que, contrairement à de nombreux films, il ne nous sort pas de l'existence mais nous en rapproche, un peu comme une promenade par une fin d'après-midi d'été avec un petit vent chaud ou un thé chaud au coin du feu après deux heures de promenade dans la neige. Le cinéma, c'est aussi ça. Merci Mike Leigh!